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Le cadre juridique des paysans français sous l'Ancien Régime



La seigneurie - La propriété du sol - Les impôts

1- La seigneurie

La France du XVIIIe siècle est peuplée d'une forte majorité de ruraux : sur les 26-27 millions d'habitants que compte le royaume en 1789, 22-23 millions sont des ruraux, soit environ 85% de la population totale.

Mais le monde des campagnes n'est pas seulement composé de paysans; y vivent aussi une petite noblesse rurale, la majeure partie du bas-clergé, de nombreux artisans et une petite bourgeoisie rurale (notaires, procureurs, marchands, médecins...). D'autre part la ville est parsemée de jardins et les paysans n'y sont pas rares.

À la fin du XVIIIe siècle, La paysannerie proprement dite représente au minimum 18 millions de personnes, soit les 2/3 de la population totale du pays.

1   Qu'est-ce que la seigneurie ?

1.1   Un territoire

Si les paysans sont à 95% libres, ils restent généralement soumis à des droits féodaux ou seigneuriaux qui pèsent sur les terres qu'ils exploitent.

La tenure est la manière dont on "tient" une terre. La tenure peut être en franc-alleu ou en fief. La tenure en censive, que possède un tenancier, est soumise au paiement de droits seigneuriaux.

La plupart des terres du royaume dépendent d'une seigneurie. Très peu sont en alleu, c'est-à-dire libres de toutes charges. Mais le seigneur n'exploite lui-même qu'une partie de sa seigneurie (le domaine ou la réserve). Le reste est constitué de tenures paysannes sur lesquelles le seigneur ne conserve qu'un droit de propriété théorique; ce droit se manifeste cependant par la perception de redevances périodiques en argent (le cens) ou en nature (le champart).

        Alleu (ou franc alleu) : héritage libre de tout devoirs féodaux. Le droit de propriété est absolu, par opposition au fief et à la censive. Seul le roi se déclare seigneur de tous les alleux.

La seigneurie est donc le territoire sur lequel s'exerce l'autorité du seigneur, y compris un droit de justice : on dit que tel paysan, telle communauté villageoise appartient à tel seigneurie. Au début du XVIIe siècle, une seigneurie sans la justice est un fief restreint.

Le seigneur est généralement un noble ou une communauté religieuse, mais il peut être aussi un bourgeois qui a acheté une seigneurie et qui en perçoit donc les droits. À la veille de la Révolution, la seigneurie est une réalité bien présente dans le monde rural.

1.2   Une forme de propriété

Figure 1 : Structure de la seigneurie

Domaine ou "directe"

Réserve

Domaine propre (mansus indominicatus du haut Moyen Âge). Le seigneur la fait valoir directement par des serfs ou des salariés, ainsi que par les corvées que lui doivent les tenanciers.

Censives

Concédées à des tenanciers. Le tenancier est celui qui tient en roture des terres dépendantes d'un fief. Les "francs tenanciers" sont ceux qui ont racheté les droit pesant sur leurs terres (cens, champart). Le tenancier, sauf mention contraire, a la propriété utile de la terre : il peut vendre, échanger ou léguer son bien moyennant le versement des droits de lods et ventes. Toutefois il peut se voir imposer le "retrait féodal" (le seigneur se subtitue, au même prix, à l'acquéreur d'un bien).

Reste

Dans le reste de la seigneurie, le droit de propriété éminente du seigneur (propriété absolue ou quiritaire) est exercée par l'intermédiaire de vassaux. Là se croisent féodalité et seigneurie.

 

C'est la propriété d'un ensemble foncier, la propriété d'une partie de la puissance sur cet ensemble foncier. L'ancien droit distingue :

La réserve seigneuriale, qui est le domaine proche;

La directe seigneuriale, qui comprend les fiefs concédés à un vassal, les censives (tenures concédées en roture), chargées de services non nobles et de redevances, dont le champart est la plus lourde dans certaines régions. Il y a diverses formes de directe, qui sont exprimées par les différences de champart :

La directe féodale : le champart est stipulé dans le bail, mais sans le cens.

La directe seigneuriale : le champart est stipulé dans le bail à cens et payé au seigneur direct. Il s'ajoute à un cens. Le champart signifie la reconnaissance d'une autorité seigneuriale, mais pas les lods et ventes par exemple.

La directe privée : le champart est payé à quelqu'un d'autre que le seigneur.

Les alleux, dont le propriétaire ne doit ni foi, ni hommage, ni rachat. Les alleux sont cependant soumis à la justice de la seigneurie, et ils peuvent être constitués en seigneurie : un allotier ne rend foi et hommage à personne, mais concède des baux emphytéotiques à d'autres.

Leur seigneur jouit donc d'un domaine foncier qu'il exploite, directement ou non, et d'un complexe de droits sur les hommes et la terre, expression de la propriété éminente de la justice qu'il détient. Par l'aveu et dénombrement, il reconnaît tenir son fief du suzerain et posséder la haute, moyenne ou basse justice.

Par nature, celui qui est capable de posséder un fief est noble, mais depuis la fin du Moyen Âge les roturiers y ont accès, sous réserve de payer le droit de franc fief : ils sont surtout nombreux autour des villes. À la fin de l'Ancien Régime, la seigneurie reste un élément d'honorabilité,

        Aveu et dénombrement : description précise et détaillée de tout ce qui compose le fief servant, tant en domaine qu'arrières-fiefs, rentes, servitudes, droits utiles et honorifiques, prééminences et prérogatives. Le vassal doit le fournir dans un acte passé devant notaire pendant les 40 jours qui suivent la foi et hommage (acte par lequel le vassal promet solennellement fidélité à son seigneur avec les formalités prescrites par les coutumes et usages locaux; cet acte perd progressivement de son importance).

Passé ce délai, le suzerain peut faire une saisie féodale, afin d'empêcher la jouissance des biens par son vassal. Si le suzerain est en désaccord, il peut "blâmer l'aveu" dans un délai fixé par les coutumes (40 jours à Paris, 30 ans en Bretagne et Normandie). Une fois l'aveu reçu, le suzerain ne peut contester au vassal aucun des droits qui y sont exprimés.

Franc fief : droit exigé d'un roturier qui fait l'acquisition d'un fief. Payé au roi, il est en principe fixé à une année de revenu sur vingt. Il est aussi versé lors de la transmission du fief après une année de jouissance. En 1771, le droit de franc fief, dont certains pays étaient exempts, est étendu à l'ensemble du royaume.

2   Les droits du seigneur

2.1   Les redevances seigneuriales

Dans la pratique, ces tenures paysannes sont devenues de véritables propriétés héréditaires soumises à certaines obligations : outre le cens et le champart, le paysan doit payer de lourds droits de "lods et ventes" si la tenure change de mains; il doit également un certain nombre de jours de corvée (généralement des charrois, ou des labours) et est obligé d'utiliser le moulin, le four et le pressoir du seigneur.

Il peut y avoir des aides exceptionnelles, comme par exemple lorsque le seigneur a besoin de faire réparer le château, ou quand il marie sa fille aînée. Enfin, dans chaque province ou région, on trouve des droits locaux dont il est impossible de faire l'énumération ou de proposer une synthèse.

Le cens (redevance en argent) est la rente féodale par excellence qui pèse sur un bien-fonds, la censive. Le cens est le signe d'une propriété directe du seigneur Il faut donc avoir un titre pour exiger le cens. Il est perçu par le seigneur sur le lieu où il est dû (cens quérable), mais il peut être porté au domaine du seigneur (cens portable). Il n'est pas très lourd (5 sous et un chapon par journal en Aunis), mais c'est un revenu non négligeable quand tous les cens sont additionnés.

        Définition du cens dans la Coutume d'Aunis : "le cens est une redevance annuelle que le seigneur stipule à son profit dans la concession qu'il fait d'un héritage dépendant de son fief. Il est à l'égard des rotures ce que le foi est par rapport aux fiefs, c'est-à-dire qu'il est le signe de la seigneurie directe, et la preuve du domaine direct retenu par le seigneur".

Le cens est imprescriptible, sauf en quelques régions comme le Nivernais, l'Auvergne, le Bourbonnais, le Dauphiné. Au cens est associé le droit de lods et ventes.

Droits de "lods et ventes" : c'est le droit de mutation perçu par le seigneur à l'occasion de la vente d'un bien-fonds roturier, tenu à cens envers lui. La quotité en est variable, peut être parfois très élevée, mais elle s'établit le plus souvent au douzième du prix de vente. Ce droit est parfois appelé ventes et issues, ventes et gants, ou ventes et honneurs.

Le champart est une redevance en nature (entre le 1/3 et 1/20e de la récolte, ordinairement 1/12), due au seigneur sur certaines terres roturières. Il est appelé "terrage" dans la France du Nord, "agrière" ou "tasque" dans le Sud.

La quotité varie entre le tiers ("tierçage") et le vingtième ("vingtain") de la récolte (ordinairement le douzième) obtenue sur les terres mises en culture; quand il porte sur une gerbe sur six, c'est le "sixtain". Il est prélevé après la dîme et en général sur place, et pèse lourdement sur les revenus des paysans. C'est un "droit de gerbe", qui porte rarement sur d'autres produits que les céréales.

Dans la région parisienne, il tend, à partir du XVe siècle, à être remplacé par un cens en argent. Quand il subsiste, il est très faible : dans les paroisses viticoles de l'Île de France, environ 6% du produit brut sur la valeur marchande du vin s'en va. Dans le pays de Caux, les prélèvements seigneuriaux sont faibles et les champarts rares.

Mais il existe encore des terres à champart à la veille de la Révolution.

        La "tierce" en Bourgogne : c'est un champart qui représente au moins le tiers du produit net. Il faut ajouter qu'en Bourgogne, la seigneurie est active et que les dîmes sont lourdes, et d'autant plus mal supportées que les seigneurs sont souvent décimateurs.

Droits seigneuriaux en Bretagne : le poids de la rente seigneuriale est compensé par la faiblesse de la dîme. Si les journaliers ne paient sans doute que la "suite du moulin", les paysans doivent une charge très lourde, le "convenant", qui peut aller jusqu'à la "quarte gerbe", 25% du produit brut et 75% du produit net. Il y a pour compenser l'élevage et ses produits.

Il faut noter en outre que dans une grande partie de la Bretagne, il existe le "domaine congéable", qui met le tenancier à la merci du propriétaire : celui-ci peut parfaitement lui enlever sa tenure. Dans le Vannetais, il s'agit de la quasi totalité des tenures.

Les banalités : droit érigé par le seigneur grâce à son pouvoir de commandement (ban) et consacré, après un long usage, par les coutumes. Leur seigneur peut contraintre ses sujet à utiliser, contre rémunération, le four banal, le moulin banal et le pressoir banal; il doit les entretenir à ses frais. Le seigneur se rétribue en prélevant une partie de la farine, du pain ou du vin produit, 1/16e par exemple dans le Poitou. Mais il peut arriver, comme en Bourgogne, qu'il y ait eu rachat soit définitif soit moyennant une redevance annuelle.

En général, les habitants ont le droit d'avoir chez eux des fours de petites dimensions, destinés à sécher les fruits et à cuire les pâtes non levées. En pays de vignoble, la banalité du pressoir est très rémunératrice.

Sous l'Ancien Régime, le système de l'affermage est pratiqué presque partout, suscitant des plaintes contre les fermiers. Au XVIIIe siècle, les juristes s'attaquent aux banalités comme contraires au droit naturel des fiefs.

Les corvées : la coutume locale fixe la durée de la corvée, c'est-à-dire le nombre de journées consacrées par les sujets au travail (fauchage du pré du seigneur, vendange de ses vignes, etc) et aux charrois au bénéfice du seigneur. Il est souvent d'usage que celui-ci nourrissent les corvéables.

On distingue les corvées personnelles, dues par ceux qui habitent dans l'étendue de la seigneurie, même s'ils n'y ont pas de biens. et les corvées réelles, dues par les possesseurs de fonds situés dans la seigneurie, même s'ils n'y ont pas leur domicile.

Le banvin : le banvin ou ban à vin, ban de vin, est le droit exclusif, reconnu aux seigneurs,de vendre le vin de leur crû, et éventuellement des dîmes s'ils en possèdent, avant tout autre producteur pendant une durée fixée par la coutume, en général 30 ou 40 jours.

Les péages : ce sont des redevances soit en nature, soit plus souvent en argent, perçues par le seigneur dans certains lieux de passage (ponts, chemins, bas), sur des personnes, sur du bétail ou sur des denrées circulant sur le territoire d'une seigneurie. On les appelle "leydes" en Basse-Auvergne, et leur nombre y est sensiblement réduit sur les chemins après 1725.

Depuis le XVIe siècle, le pouvoir royal s'efforce d'en réduire le nombre. Les suppressions interviennent surtout après l'établissement, en 1725, d'une commission de révision des titres de péages (la "Commission des péages"), et après l'édit de 1779 (voir plus bas) par lequel les seigneurs percevant des péages sont mis en demeure de prouver leurs droits et la bonne observation des règlements royaux. L'État supprime ainsi des péages dans le Languedoc. Le maintien de nombreux péages (600 environ en 1789) contribue à entraver gravement le trafic des denrées jusqu'à la fin de l'Ancien Régime.

        Circulation des grains : la déclaration de mai 1763, oeuvre de Bertin, permet la libre circulation à l'intérieur du royaume afin "d'arrêter les inconvénients du monopole" en assurant une "concurrence libre et entière".

Elle est complétée par l'édit de juillet 1764, dû à Laverdy, qui rend l'exportation libre par 36 ports, si le prix des grains n'excède pas un certain niveau.

Sous Turgot, l'arrêt du conseil du 13 septembre 1774 prescrit la libre circulation des blés à l'intérieur du royaume et autorise l'importation de céréales étrangères. Les mauvaises récoltes de 1774 entraînent la cherté du blé et déclenchent au printemps 1775 la guerre des farines, marquée par des émeutes dans le royaume et jusque dans les cours de Versailles. Pour supprimer toutes les entraves au commerce des grains, Turgot supprime les droits perçus sur les routes et à l'entrée des villes ou des marchés. En avril 1776, il accorde aussi la liberté intérieure au commerce des vins.

2.2   Évolution de la puissance seigneuriale

Seigneurie et communauté paroissiale ne correspondent pas toujours. Une seigneurie peut recouvrir plusieurs paroisses et inversement une paroisse peut avoir plusieurs seigneurs. La puissance seigneuriale est très variable selon les régions : dans le Midi qui contient beaucoup d'alleux, elle est faible : elle doit faire la preuve de ses droits et peut perdre ses procès contre la communauté. Dans la France du nord, et plus particulièrement en Bretagne et en Bourgogne où se rencontre la mainmorte (voir plus bas), dernier vestige du servage, elle est forte.

Le seigneur affirme que les communaux lui appartiennent et prétend convoquer, présider et dominer la communauté des habitants. Sa justice, qui joue d'ailleurs un rôle positif d'arbitrage, est contestée, dans la mesure où elle traite des litiges entre paysans et seigneur. La justice est une source de revenus pour le seigneur avec les amendes.

--- La réaction nobiliaire du XVIIIe siècle --- Dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, on assiste à une réaction nobiliaire (édit de Ségur en 1781 sur les quatre quartiers) et seigneuriale ou féodale. Les nobles s'efforcent de tirer un plus grand profit de leur seigneurie.

Ils utilisent pour cela des spécialistes du droit féodal, les feudistes, qui remettent en vigueur des droits anciens tombés en désuétude et cherchent à prouver la propriété du seigneur sur les biens communaux, avec la réfection des terriers. Cela multiplie les tensions et les conflits après 1750.

--- Les terriers --- Le terrier ou papier terrier est un registre qui renferme les lois et usages d'une seigneurie, les droits et conditions des personnes et des biens-fonds dans l'étendue de la seigneurie, les déclarations des censitaires, les baux à cens, les procès-verbaux des limites de justice, le dénombrement de tous les droits de la seigneurie.

La réaction seigneuriale, qui se traduit notamment vers la fin du XVIe siècle et au XVIIIe siècle par une volonté de meilleure gestion, demande aux feudistes de procéder à la réfection des terriers, ce qui aboutir à remettre en vigueur des droits anciens tombés en désuétude, et à fixer les limites des terres roturières, après arpentage.

Par la suite, les terriers font l'objet de renouvellements périodiques, en général tous les 30 ans, afin d'éviter la prescription et de les tenir à jour. La nouveauté est la combinaison des droits et des aveux, l'adaptation des plans géométriques aux terriers, et l'application des titres aux plans, ainsi que le souligne, peu avant 1789, le rédacteur des Institutions sur la confection des terriers de réformation des seigneuries pour le duché breton de Penthièvre.

2.3   La justice seigneuriale

Le seigneur, qui a obtenu concession du souverain, rend la justice dans l'étendue de sa seigneurie. Mais tous les seigneurs n'ont pas les mêmes droits, qui ne sont pas identiques à travers le royaume. Depuis le Moyen Âge, on distingue la haute, la moyenne, la basse justice et la justice foncière.

--- Haute, moyenne et basse justice ---

Haute justice : c'est le droit de connaître toutes les causes personnelles, réelles et mixtes, entre les sujets :
connaissance de tous les crimes commis dans la seigneurie;
possibilité d'avoir une juridiction contentieuse;
droit de nommer tuteurs et curateurs;
obligation d'avoir prisons et geôliers;
connaissance des causes des nobles, qui sont domiciliés, ou de leur biens sur l'étendue de la seigneurie;
connaissance, par le juge de la haute justice, des dîmes inféodées tenues en fief du seigneur haut justicier;
droit de revendiquer ses justiciables de la juridiction royale, en raison de la patrimonialité des justices comme des fiefs;
droit d'avoir des fourches patibulaires, pilori, échelles et carcans;
droit de faire la police;
droit de confiscation des biens du condamné à mort naturelle ou civile;
droit d'amende, des épaves et des biens vacants par déshérence ou par bâtardise.

Moyenne justice : elle comprend :
la connaissance des délits et crimes dont la peine ne peut être qu'une légère correction corporelle, banissement temporel ou amende de 75 sols;
la connaissance des actions civiles, sauf quelques cas royaux;
l'inspection des poids et mesures;
la création de tuteurs et curateurs;
l'information et l'instruction contre les délinquants "jusqu'à la sentence" exclusivement;
Le seigneur moyen justicier "peut et doit avoir siège, juge, procureur d'office, greffier, sergent et prison au rez-de-chaussée, sûre et raisonnable, avec un geôlier pour la garder".

Basse justice : elle est limitée à la connaissance des délits, n'entraînant pas une amende supérieure à 60 sols. Dans la vie quotidienne des paysans, la basse justice a la plus grande importance. Souvent un même seigneur exerce à la fois la moyenne et la basse justice.

Justice foncière : là où elle existe, ses limites sont imprécises, et elle tend à se confondre avec la basse justice.

--- Seigneurs et exercice de la justice --- La "création de justice" est la désignation des officiers qui représentent le seigneur dans la seigneurie, notamment le maire ou mayeur. Les justices seigneuriales sont patrimoniales, vénale et héréditaires. Depuis la fin du Moyen Âge, la monarchie restreint leur compétence en multipliant les cas royaux et elle interdit aux seigneurs, qui depuis longtemps ne jugent plus eux-mêmes, de choisir des juges sans capacité.

        Maire : c'est l'officier du seigneur dans une communauté d'habitants. Il peut y avoir plusieurs maires si une même localité est partagée en plusieurs seigneuries distinctes. Le seigneur peut procéder seul à sa désignation ou accepter une certaine participation de l'assemblée des habitants, qui avance un nombre déterminé de noms.

Le maire est chargé de veiller au maintien du régime seigneurial : il décide, juge, perçoit au nom du seigneur. En contrepartie, il bénéficie de nombreuses franchises. Les maires font toujours partie des plus importants habitants du village, et la fonction reste en fait fréquemment confisquée par un nombre réduit de familles.

Mais jusqu'à la fin de l'Ancien Régime, le seigneur s'attache à préserver ses droits. Appuyés sur l'exercice de la justice, ils lui assurent le maintien des redevances. C'est la justice qui donne à la seigneurie sa force. La possession de la justice est une garantie du paiement des redevances et le seigneur manifeste un intérêt permanent à sa sauvegarde.

À la justice se rattachent les banalités et la police générale dans la seigneurie. Dans le Bassin Parisien, l'affaiblissement de la justice seigneuriale s'explique par la multiplication des juges royaux. À l'inverse, en Bretagne, le lien entre la justice et le fief est très marqué : la vigueur des hautes justices reste exceptionnelle.

3   La subsistance du servage

La seigneurie est un vestige de la féodalité médiévale. La féodalité politique et militaire a disparu, mais les seigneurs gouvernent les campagnes. C'est une féodalité civile. Les grandes variations dans le royaume tiennent au droit (pays de droit écrit ou coutumier) et aux coutumes provinciales et locales.

3.1   La mainmorte

Ce développement est essentiellement basé sur Thierry Bressan, "Le servage résiduel aux XVIIe--XVIIIe siècles : l'exemple de la mainmorte bourguignonne et comtoise", in Hélène Fréchet, dir., La terre et les paysans en France et en Grande-Bretagne de 1600 à 1800, Paris, Éditions du Temps, 1998, p. 56

À la veille de la Révolution, la masse paysanne est dans sa quasi-totalité juridiquement libre. Le servage existe encore dans quelques régions sous la forme de la servitude personnelle. En revanche, la mainmorte existe à plus grande échelle et sous une terminologie plus variée; n'y échappent que le Midi, l'Île de France et la Normandie. Les aires concernées [par la mainmorte] se trouvaient, pour l'essentiel, réparties selon une ample demi-lune allant du Massif Central à la Savoie et aux Ardennes. L'ensemble des régimes mainmortables représentent, vers 1789, entre 500 000 et 1 million de personnes, surtout si l'on y inclut les individus soumis à un droit mortuaire isolé.

La mainmorte est le droit du seigneur de prendre les biens de son serf à sa mort. Les biens font échute, réversion au seigneur.

On appelle aussi biens de mainmorte ceux qui appartiennent à une personne juridique : ce sont des biens des collectivités qui ont le privilège de pérennité et n'ont pas à transmettre leurs biens à des héritiers.

Les gens de mainmorte ou mainmortables sont libres de leur personne et peuvent vendre leurs biens à des gens de même condition et de même seigneurie. Il y a deux sortes de mainmorte :

La mainmorte personnelle, ou mainmorte de corps, porte sur tous les biens du serf, y compris ses terres libres : tout revient au seigneur. Elle se transmet héréditairement.

La mainmorte réelle, ou mainmorte foncière, s'attache à la possession de biens-fonds spécifiques (terres, maisons). Elle ne se transmet donc pas par le sang.

Il y a une forme particulière d'assujetissement, qui est le prélèvement systématique d'un seul effet mobilier de la sucession, le meilleur ou le second en valeur : la plus belle vache, ou le meilleur cheval, ou le meilleur habit, etc. C'est appelé "droit de meilleur catel" en Hainaut, "droit de chef d'hôtel" en Lorraine, "droit de Todfall ou Besthaupt" en Alsace. La mainmorte varie aussi selon l'étendue de l'échute :

Toute la succession, biens meubles et immeubles;

La "mainmorte de meubles" porte sur tout ou partie de la succession mobilière;

La "mainmorte d'héritages" porte sur les seuls biens-fonds reconnus comme serviles. En France, hormis le cas marchois, toutes les mainmortes purement réelles sont aussi des mainmortes d'héritage.

Les gens de mainmorte sont dans l'incapacité juridique de transmettre ces mêmes biens à d'autres qu'à leurs enfants lorsqu'ils vivent en communauté avec eux. La mainmorte s'exerce donc en cas de défaillance d'héritier en ligne directe et en communion ("communiers"). Il faut donc faire bourse commune, habiter sous le même toit, être en "communauté taisible"; il faut un "héritier compétent".

La mainmorte en Bourgogne et en Franche-Comté

C'est une "mainmorte mixte" qui unit mainmortes personnelle et réelle. Elle est en vigueur dans le duché de Bourgogne (sans l'Auxerrois et le Mâconnais), et la Franche-Comté. Les règles en ont été fixées par les deux coutumes provinciales, rédigées sur ordre du duc Philippe le Bon en 1459. En matière de mainmorte, la Comté a quelques coutumes locales non homologuées mais acceptées par les autorités provinciales et les cours judiciaires.

En Bourgogne, un gros tiers des localités régionales (villages et hameaux) auraient connu le servage; par contre, la mainmorte épargne presque complètement les parties centrales et orientales de la province (Dijonnais et alentours), contrôlées par la bourgeoisie urbaine.

En Franche-Comté, il semble que le tiers de la population est serve. Dans les campagnes de la province, les lieux serviles sont omniprésents, sauf autour de Besançon, pôle de franchise, et dans les zones de vignoble. Globalement il se dégage deux grandes aires : le baillage d'Amont au nord (l'actuelle Haute-Saône en gros) et l'extrême sus avec le haut Jura. La majorité des seigneuries serviles y relèvent de l'Église, avec en particulier les deux abbayes de Luxeuil et de Saint-Claude.

Au XVIIIe siècle, ces deux régions forment de loin le pôle servile le plus important du royaume : 75% des serfs et 50% des mainmortables du royaume.

--- Sortir de la condition de mainmortable --- Il est possible de tourner l'obligation de la mainmorte par reprêt (qui n'existe pas sur la terre de Luxeuil) : on dit qu'un héritier est en communion parce qu'il a passé sa nuit de noces dans la maison de son père, parce qu'il a fait un geste, laissé un représentant... Il y a donc peu de cas réels où la mainmorte s'exerce. Pour sortir de la condition mainmortable individuelle, il y a généralement deux voies :

L'affranchissement conventionnel (ou manumission), c'est-à-dire le traité d'affranchissement délibérément accordé par le seigneur au prix qu'il fixe, puis homologué par la justice royale moyennant une légère taxation;

L'affranchissement par désaveu, qui est la grande spécificité de la mainmorte coutumière burgundo-comtoise, car il en traduit l'aspect mixte, à la fois réelle et personnelle. Le serf intime à son seigneur sa résolution de se voir affranchir, et au terme de solennités et d'une brève procédure judiciaire, il devient franc. Mais en contrepartie il doit abandonner à son seigneur l'ensemble de ses fonds, et la plus grande partie de ses biens meubles. Il faut choisir entre "la liberté ou la terre".

Le désaveu n'existe pas dans la terre de Luxeuil, ce qui rend le servage en vigueur dans cette seigneurie purement personnel. La procédure d'autre part n'est usuelle que dans la terre de Saint-Claude : les seigneurs ne tiennent pas à perdre le revenu que représente la mainmorte (15-25% du revenu annuel total en moyenne, sans dépasser ces chiffres).

Hormis le traité particulier, le désaveu et, sous certaines réserves importantes en Comté, le mariage avec un homme libre, il n'existe aucun autre mode d'affranchissement. La condition de mainmortable est une tare sociale : selon le jurisconsulte comtois Talbert (seconde moitié du XVIIe siècle), l'appelation non fondée de "mainmortable" est une insulte grave susceptible d'une réparation judiciaire. Les localités où sévit la généralité de mainmorte, surtout si les villages voisins en sont exempts, souffrent d'une réelle mise à l'écart qui s'observe dans les mariages. En Franche-Comté, un mainmortable est exclu de la plupart des corps de bourgeoisie urbaine, de corps de métiers, des compagnies d'officiers civils.

3.2   La servitude

Le serf ne peut se déplacer, se marier, etc, librement. Il y a deux formes de servitude :

La servitude réelle : c'est celle que l'on contracte en possédant une terre servile, et que l'on perd en laissant la terre.

La servitude personnelle : elle est transmissible par mariage si c'est l'époux qui est serf. Elle est aussi transmissible par naissance; ce qui domine c'est par exemple :
La condition du père en Bourgogne;
La condition de la mère en Lorraine;
La pire des deux dans le Bourbonnais;
La meilleure des deux dans l'Auxois;
L'option : l'enfant choisit, mais avec des quotas : l'aîné choisit, mais pas le deuxième enfant.

La servitude personnelle affecte le bas Berry, la Combraille, le Morvan nivernais, la région de Luxeuil, le Verdunois, les terres mosellanes, la basse Alsace, des seigneuries vosgiennes jusqu'en 1719 (suppression par rachat du pouvoir ducal lorrain). Elle a quasiment déserté le Barois et la "Savoie française" (Bresse, Bugey, Valromey, Gex).

Un serf est soumis à différentes contraintes :

La forfuyance : il n'a pas le droit de partir. Le seigneur a sur eux le droit de poursuite, c'est-à-dire le droit de les faire rechercher.

Jean-Guillaume Moreau est un mainmortable bourguignon parti jeune de son village d'origine, Thostes en Auxois. Il s'installe à Paris, lieu franc, y réside plusieurs décennies et meurt en 1730 à la tête d'une imposante fortune (au moins 150 000 livres tournois). Il est l'exemple le plus fameux d'un mainmortable sur qui le seigneur a exercé son droit de poursuite, pour récuperer les biens.

Le Parlement parisien ratifie le droit de suite des seigneurs bourguignons en 1738, au bout de huit années d'un procès qui voit intervenir des personnalités aussi prestigieuses que le prévôt des marchands et les élus des États de Bourgogne. En 1739, les Parlements de Dijon et de Besançon réaffirment de la manière la plus intransigeante les principes rigides de leurs coutumes en matière de mainmorte.

Selon le formariage, un serf n'épouse pas une personne libre, ou une personne en dehors de la seigneurie. Le formariage est corrigé par l'échange : on peut épouser une fille de la seigneurie voisine à condition qu'elle vienne se marier dans la seigneurie de celui qui veut se marier. Le droit de formariage n'est plus en usage en Bourgogne ni en Franche-Comté, sauf exceptions locales (Luxeuil, Mouthe, quelques seigneuries du duché).

Il est possible de quitter un seigneur pour un autre sans déménager. Ce système s'accompagne de la retenue : on continue à retenir les redevances sur des serfs qui sont partis pour une autre seigneurie. À noter que Thierry Bressan a une autre (c'est le moins qu'on puisse dire) définition pour le "droit de retenue" : c'est le droit qui permet au seigneur de retirer tout bien local en vente soumis à son consentement puis de l'aliéner à son profit. Le droit de retenue et les enchères auxquelles ils donnent souvent lieu tiennent lieu de vuidemain en Comté.

Il y a des contraintes à la donation entre vifs : elle est restreinte à la seigneurie. Si un serf vend son bien à un marchand de la ville voisine, le seigneur peut exercer son droit imprescriptible de "videmain" (ou vuidemain), c'est-à-dire contraindre le marchand à restituer la terre. De fait, les incapacités serviles en droit bourguignon et comtois visent exclusivemnt la libre disposition du patrimoine par le seigneur.

N.B. : cette limitation de transmission entre vifs n'est pas inhérente à la mainmorte.

Il existe toute une marquetterie de conditions auxquelles on peut se racheter. Par exemple, un père peut racheter sa fille qui veut se marier, lui restant serf. On peut aussi racheter une redevance, un droit, sans racheter toute la servitude. On distingue donc des gens plus ou moins serfs, selon les régions :
Hainaut : ne subsiste que le meilleur catel;
Lorraine allemande : servitude personnelle, pas de mainmorte (1) ;
Lorraine et Vosges : mainmorte mobilière;
Champagne : servitude personnelle et mainmorte mobilière;
Bourgogne, Savoie, Auvergne : mainmorte mobilière, mais pas beaucoup de servitude;
Bordelais et Béarn : quête (redevance assez faible) et année de service gratuit avant de se marier ou d'être affranchi.

--- Les évolutions du XVIIIe siècle --- La mainmorte décline aux XVIIe et XVIIIe siècles, mais reste encore dans certains régions une arme aux mains du seigneur. Au cours du dernier tiers du XVIIIe siècle, dans le cadre de la "réaction seigneuriale", on voit une renaissance de la servitude, repérable par exemple dans le Duché de Bourgogne à la réactivation de l'action en vuidemain.

Un revirement se produit à partir des années 1760 (Lumières, Encyclopédie, mouvements en faveur de l'unification du droit, etc). La première étape est l'arrêt Truchot de juin 1760 : le Parlement de Paris refuse d'accorder l'échute à l'occasion d'un procès autour de la succession d'un serf d'ascendance nivernaise, Pierre Truchot. Cet arrêt est entériné par plusieurs décisions semblables. Mais ce qui donne un écho quasi "national" à cette affaire de la mainmorte est le procès qui s'élève en 1769-1770 entre le chapitre de Saint-Claude et six de ses communautés serves, qui lui constestent la validité de ses prérogatives mainmortables. Voltaire jette son énorme crédit dans la bataille en faveur des villageois. Avec un jeune avocat de Saint-Claude, Christin, il multiplie les actions et requêtes, allant jusqu'à proposer un plan d'affranchissement général pour le royaume. Les religieux de Saint-Claude gagnent la bataille juridique en 1775-1777, mais l'affaire a eu un impact considérable, y compris sur le gouvernement.

Louis XVI, par l'édit royal du 6 août 1779, sur l'avis de Necker, supprime toute forme de servitude ou mainmorte au sein du Domaine royal moyennant, pour la seule mainmorte réelle, le léger cens d'un sou par arpent. Le point fondamental est que l'édit abolit le droit de suite dans le royaume entier : tout serf peut désormais s'affranchir, lui, sa famille et son patrimoine (à l'exception des fonds spécifiquement mainmortables) en acquérant simplement "un véritable domicile dans un lieu franc".

Mais, par respect sourcilleux de la propriété privée, il ne touche pas aux autres prérogatives serviles des seigneurs particuliers, les invitant simplement à suivre l'exemple royal. L'édit provoque une levée de boucliers dans le Parlement de Besançon, qui n'enregistre le texte que sous la contrainte militaire en mai 1788 : la mesure de 1779 attend près de 9 ans avant de devenir exécutoire sur le sol comtois.

Le mouvement quasi-unanime contre les restes du servage s'exprime dans les cahiers de doléances du printemps 1789, aussi bien dans les régions de mainmorte (204 cahiers sur 212 pour le baillage de Baume-les-Dames) que dans les régions ignorant tout servage résiduel. Il est intéressant de noter qu'un nombre non négligeable de ces cahiers envisagent l'indemnisation des seigneurs pour la mainmorte mixte ou réelle.

Le million de serfs qui reste est affranchi dans la nuit du 4 août 1789 (abolition des privilèges), par le décret des 5-11 août 1789.

(1) La littérature juridique sur le servage et la mainmorte est en outre considérable en Bourgogne, et connaît son apogée dans la première moitié du XVIIIe siècle avec les écrits du président du Parlement de Dijon Jean Bouhier, des professeurs dijonnais Gabriel Davot et Jean Bannelier, et surtout avec le célèbre Traité de la mainmorte de l'avocat et professeur François-Ignace Dunod de Charnage (originaire de Saint-Claude), dont la première édition date de 1733.

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2. La propriété du sol

1   Propriétaires et exploitants

Il est malaisé de cerner avec précision la part de la "propriété" paysanne dans la France du XVIIIe siècle, compte tenu des fortes disparités régionales. On admet généralement les chiffres suivants :

 

Noblesse

Clergé

Bourgeoisie

Paysannerie

Moyenne française

20-25%

10%

25-30%

40-45%

Artois

29%

32%

6%

33%

Flandre

22%

19-20%

17%

30-31%

Cambrésis

?

~ 40%

?

< 30%

Pays de Caux

?

?

?

15%

Vire (B. Normandie)

13-23%

1,6%

12%

20-70%

Alsace

2-30%

25-35%

5-10%

30-60%

Bourgogne

35%

11%

20%

33%

Armor

20-74%

1%

11-32%

15-48%

Limousin

15,5%

2,5%

23%

59%

Saint-Gaudens (Comminges)

16%

2%

38%

29%

Lauragais et Toulousain

40-50%

<10%

30-40%

10-20%

Languedoc (garrigue)

?

?

?

50-60%

Languedoc (plaine)

55%

?

25%

20%

Figure 2 : La propriété foncière en France

La propriété paysanne semble plus importante dans la moitié sud de la France, mais, dans le détail, on observe toujours de grands contrastes d'une région à l'autre : 98% de tenures paysannes dans le Béarn, 22% autour de Toulouse. La propriété est plus importante dans les montagnes et le Midi, faible dans l'Ouest et près des villes.

1.1   La propriété paysanne

Sauf dans quelques régions où vit une importante paysannerie sans terre (Flandre maritime, Basse-Normandie), la plupart des paysans français sont propriétaires. Mais généralement, ils n'ont en faire-valoir direct que quelques parcelles insuffisantes pour les faire vivre (souvent moins de 2 hectares). Ils sont donc contraints de cultiver principalement la terre d'autrui : le paysan français du XVIIIe siècle est donc avant tout :

Fermier, notamment dans les riches plaines de grande culture du Bassin Parisien ou de la région du Nord;

Métayer, notamment dans l'Ouest et le Sud-Ouest (Bretagne, Poitou...). Le métayage est le mode de tenure le plus fréquent dans l'Ouest, le Centre et le Sud de la France. Le propriétaire apporte le capital foncier, du bétail et des semences; le métayer, ses outils et sa force de travail. Dans le bail à mi-fruit, tous les profits sont partagés par moitié. Parfois le propriétaire ne prend que le tiers, exceptionnellement le quart; il s'agit alors d'une amélioration du bien-fonds, apportée par le métayer, par exemple dans le cas de conversion d'une terre ou d'une friche en vigne.

* Dans la Gâtine poitevine, la métairie est "un domaine rural pourvu de bâtiments, exploité par un fermier ou un métayer, et dont l'étendue exige un cheptel abondant, en particulier un train de labourage très étoffé". Son étendue se situe entre 25 et 60 hectares.

Les types de métayages sont en France très divers et de statut souvent complexe. Au XVIIIe siècle, les agronomes et les physiocrates se montrent fort hostiles au système du métayage, responsable à leurs yeux de la stagnation de l'agriculture.

Salarié agricole dans une ou plusieurs exploitations, trouvant parfois un complément de ressources dans l'artisanat rural. Les paysans dépendants complètent ainsi souvent leurs revenus par d'autres activités: tisserand en Picardie, émigration temporaire comme instituteur ou colporteur dans les Alpes, maçon dans le Limousin, montreur d'ours dans les Pyrénées.

1.2   La société paysanne : les paysans propriétaires

Plus que la propriété, c'est l'exploitation qui définit les différentes catégories de paysans :

Au sommet, les grands exploitants (de l'ordre de 20 hectares). Ils disposent de "charrue et attelage". Ils sont généralement désignés sous le terme de "laboureurs". Ils peuvent être propriétaires, fermiers, parfois les deux (faire-valoir mixte). Le paysans indépendant s'en tire même pendant les mauvaises années.

Les plus aisés, ceux à qui il reste un surplus de grains négociables, sont souvent nommés "coqs de paroisse", ou, dans le nord, "fermiers à grosses bottes" et "matadors" : notables ruraux, souvent alphabétisés, ils jouent un rôle prépondérant dans les assemblées villageoises. Le "coq de village" est souvent l'intendant du seigneur pour lequel il perçoit les rentes, dont il garde une partie.

En dessous, les petits exploitants : propriétaires parcellaires, fermiers ou plus souvent métayers, nommés selons les régions "ménagers, bordagiers, closiers, personniers, faisandier". Leur condition, souvent précaire, dépend à la fois de l'étendue de leur exploitation, souvent morcellée (autour de 5 hectares) et de la conjoncture économique.

1.3   Les manouvriers

Les "manouvriers" ou "brassiers" (vivant du travail de leurs mains ou de leurs bras), qui ne sont ni propriétaires (sauf de minuscules parcelles) ni exploitants : c'est un énorme prolétariat rural (peut-être 60% de la paysannerie) de salariés agricoles permanents, occasionnels, saisonniers comme le domestique ou le valet de ferme (payé à l'année), le journalier (qui se loue à la journée). Leur caractère essentiel est d'être dépendants sur le plan économique.

Cette paysannerie sans terre peut posséder quelque bétail grâce à l'existence des biens communaux et au droit de vaine pâture, d'où son attachement aux pratiques collectives, combattues en revanche par les gros exploitants. Mais même s'il est propriétaire, le manouvrier est hors d'état d'assurer la subsistance de sa famille. Il lui faut contracter avec un bourgeois de la ville un bail à cheptel, qui lui permet d'avoir un peu de lait, de beurre et de fromage. Il doit surtout travailler pour autrui au moment des fenaisons, moissons, vendanges. Le reste de l'année, il cherche du travail dans les bois, l'entretien des terres à céréales et des vignes, dans la construction de maisons.

* Vaine pâture : pâture sur les friches, les bords des chemins, les bois de haute futaie, les bois taillis après 4 ou 5 ans, et sur les terres débarrassées des cultures. Chaque membre de la communauté d'habitants peut y envoyer ses bêtes sans frais. La vaine pâture est réglée par les coutumes.

En fait, la situation est très variable selon les régions et les époques :

Dans le Midi, les manouvriers dépourvus de propriété et misérables se rencontrent partout, mais en nombre relativement réduit.

Dans l'Ouest, les bordagers exploitent des étendues inférieures.

Autour de Paris, il y a davantage de laboureurs que de manouvriers au XVIe siècle.

À peu près partout, l'évolution économique provoque, surtout à la fin du XVIe siècle et dans la deuxième moitié du XVIIIe siècle, l'endettement des paysans, et réduit progressivement leur propriété : le phénomène est surtout sensible dans les pays de vaste culture où, comme dans le Bassin Parisien, les manouvriers forment la grande majorité de la population rurale.

* Dans les villages de Picardie, les manouvriers-sergers associent aux activités paysannes le travail de filature et de tissage pour le compte de marchands-entrepreneurs du bourg et de la ville voisine qui leur procurent matière première et métiers à tisser. Ce type se rencontre aussi dans les autres régions productrices de textile (Ouest, Champagne, Languedoc).

2. Les communaux

C'est un ensemble de biens dont la communauté des habitants possède l'usage : pâquis, friches, landes, buissons, herbages, marais, forêts. Cette zone sert essentiellement à l'élevage du bétail, surtout celui des petits paysans et des pauvres. Les communaux contribuent largement à assurer l'unité de la cellule rurale.

Au milieu du XVIIe siècle, la communauté a perdu beaucoup de ses biens. Les enquêtes des intendants révèlent l'ampleur de l'usurpation des communaux par des seigneurs, les riches robins et marchands, et les notables locaux. De nombreux procès éclatent entre communautés voisines. Le sentiment de la propriété du communal fortifie l'esprit de groupe. Au XVIIIe siècle, la grande usurpation seigneuriale et bourgeoise est terminée. Si la restitution des communaux n'a pas pu être réalisée, la monarchie, par ses intendants, assure la protection de la communauté et de ses biens.

Mais une autre menace se dessine avec l'essor de l'individualisme et avec l'influence des théories physiocratiques, qui gagnent les pouvoirs. Les droits et usages communaux sont perçus comme contraires à la liberté naturelle et aux progrès économiques.

* De 1769 à 1781, le partage des communaux est autoriés par édits dans les Trois-Évêchés, la Lorraine (mars 1767), l'Alsace, le Cambrésis, la Flandre, l'Artois, la Bourgogne, la généralité d'Auch et de Pau. Ailleurs, des opérations identiques sont faites localement. L'on pousse à la mise en culture des anciens terrains de pacage collectif.

Parallèlement, la liberté de clore les terres individuelles est accordée, mettant fin au libre parcours, jusque là pratiqué après les récoltes en pays de champs ouverts. La résistance paysanne s'exprime plus ou moins spontanément par les bris individuels ou collectifs des clôtures.

Dans les faits, les partages de communaux sont assez rares : les villages restent en général fidèles à la propriété collective.

3. La forêt

Pendant les guerres de religion, les opérations militaires, les besoins des armées, les difficultés financières des rois et des princes entraînent un désordre dont souffrent les forêts, malgré les ordonnances des souverains. Sous Henri IV, le relèvement est lent et incomplet en dépit de la création d'une surintendance générale des eaux et forêts. Ni Richelieu, ni Mazarin ne parviennent à enrayer la décadence des forêts françaises, tombées depuis le début du XVIe siècle d'environ 35% du territoire à 25-26%.

C'est Colbert qui mène à bien la tâche de réformation par la grande ordonnance des eaux et forêts, prise à Saint-Germain-en-Laye en août 1669 : les forestiers royaux ont une compétence accrue; des règles précises d'exploitation doivent être suivies dans les forêts seigneuriales et privées. Mais en raison des guerres, des constructions navales et des forges, d'importants dégâts sont commis dans les forêts au cours de la seconde moitié du règne de Louis XIV. La situation paraît s'améliorer ensuite jusque vers 1750.

La fin de l'Ancien Régime est marquée par le déclin des forêts, réduite par la demande d'une population plus nombreuse et plus exigeante, les défrichements, les besoins des armées, de la marine et des industries. Les cahiers de doléances regorgent de réclamations sur la rareté et la cherté du bois. Le rôle de la forêt est considérable pour les paysans sous l'Ancien Régime, avec divers droits d'usage, soumis aux usages locaux : droits d'affouage, de maronage, de ramassage du miel ou des fruits sauvages, de pâturage pour les porcs (glandée) pour les bêtes à laine ou pour le gros bétail (pacage), de l'herbe sous futaie, de chasse aux animaux nuisibles ou aux oiseaux de passage.

* Affouage : droit d'usage concédé, à l'origine, de la propre volonté du seigneur à une communauté d'habitants, l'autorisant à se servir du bois de feu. La pluppart des coutumes limitent le droit de l'usager au bois mort, ou au bois vif des essences inférieures de la forêt. L'affouage peut aussi être le produit de la forêt de la communauté, destiné au chauffage est délivré aux habitants. La forêt, qui fournit l'affouage, s'appelle souvent la fourasse.

Maronage : droit, pour un membre d'une communauté d'habitants, d'obtenir du bois, appelé bois de maronage ou de marnage, bois merrain ou merrien, destiné à la construction ou à la réparation des maisons (pièces de charpente,etc).

Glandée (ou panage ou paisson) : c'est le droit d'envoyer les porcs rechercher glands et faînes dans les forêts pendant une période déterminée; selon les régions, cela va du 8 septembre (Notre-Dame de septembre), du 29 septembre (Saint-Michel), ou du 1er octobre (saint Rémy) au 30 novembre (saint André), parfois au 1er février. Selon certaines coutumes, cette période est prolongée jusqu'au 23 avril (saint Georges): c'est le temps de recours, d'arrière-paisson ou d'arrière-panage. La redevance qui correspond à cet usage de première nécessité permet de faire des baux de glandée un placement assez important, dont les règles sont précisées par l'ordonnance de 1669, avec fixation du nombre maximum des porcs par les maîtres particuliers des eaux et forêts.

La sylviculture cependant progresse au cours du XVIIIe siècle. Duhamel du Monceau préconise d'implanter en France des espèces étrangères, d'allonger le cycle des taillis jusqu'à 30 ans, d'éclaircir les futaies feuillues. En 1786, Brémontier commence le reboisement des Landes.

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3- Les impôts

Leur poids s'est un peu atténué au XVIIIe siècle, sauf dans les dix dernières années de l'Ancien Régime. Ce sont les impôts indirects qui font la plus grande partie de la pression fiscale.

1   Les impôts royaux directs

1.1   La taille

C'est une imposition sur les personnes ou sur les biens, longtemps perçue par les seigneurs sur leurs serfs et censitaires, mais levée aussi parfois par eux pour le compte du roi : c'est jusqu'en 1695 le seul impôt direct. Noblesse et clergé sont exemptés de la taille.

La taille personnelle est assise sur les facultés des taillables, qu'apprécient les collecteurs.

La taille réelle porte sur les biens, par exemple sur la terre roturière, même si elle appartient à des privilégiés.

La taille royale, établie en 1439 pour pourvoir aux besoins de l'armée permanente, ne pèse que sur les roturiers. Le roi fixe chaque année en son conseil le brevet de la taille, c'est-à-dire le montant global, réparti ensuite entre les généralités. Puis elle est répartie entre les élections par la commission de la taille, enfin entre les paroisses où la cote est faite par les asséeurs dans le rôle de taille. Les asséeurs sont des habitants élus dans le cadre de chaque paroisse pour établir, sous leur propre responsabilité, les rôles de la taille, qui est ensuite levée par les collecteurs. Par l'édit de mars 1600, les deuxs fonctions sont confondues.

Pour éviter les inégalités et les abus de la taille personnelle, on s'efforce qu XVIIIe siècle de mettre en place une taxation des revenus d'après un tarif fixé préalablement : c'est la taille tarifée.

1.2   La capitation

La capitation est établie en 1695 lors de difficultés financières; c'est un impôt très novateur, car les privilégiés doivent le payer. 22 classes sont distinguées d'après les fonctions et les titres. Après la réforme de 1701, chaque généralités doit fournir une certaine somme à répartir entre les contribuables.

L'intendant fixe la capitation des nobles qui obtiennent des réductions et parfois même ne la payent pas. Les métiers, les cours de justice et la ville de Paris procèdent eux-mêmes à la répartition. Les pays d'état s'abonnent. La capitation subsiste jusqu'à la Révolution.

1.3   Le vingtième

En mai 1749, le dixième est supprimé à partir du 1er janvier 1750. À sa place est établi le vingtième, prélèvement d'un vingtième sur tous les revenus, privilégiés ou non. Il s'agit essentiellement du vingtième des biens-fonds, des offices et droits, d'industrie. Le produit doit en être versé dans une caisse d'amortissement, distincte du Trésor royal et uniquement destinée au remboursement des dettes de l'État. L'impît est établi selon les déclarations de chacun, vérifiées par les contrôleurs royaux, même dans les pays à assemblées d'État.

Devant cette atteinte aux privilèges, l'opposition se déclare aussitôt, menée par le clergé. Finalement, en décembre 1751, Louis XV suspend l'application du vingtième pour les propriétés ecclésiastiques. Par contre, les parlements et états provinciaux doivent céder. Un second vingtième est prélevé à partir de 1756 (début de la guerre de 7 Ans), mais comme le précédent, il est faussé et amenuisé par les abonnements qu'il faut bientôt accorder (comme à la Franche-Comté). En 1760, la situation est telle qu'il faut bientôt instituer, malgré une forte hostilité, un troisième vingtième. La fin de la guerre ne met pas fin aux embarras financiers, mais amène en 1763 la suppression du 3ème vingtième.

Il réapparaît de 1782 à 1785 (guerre d'Amérique). Il est levé uniquement sur tous les revenus imposés pour les autres vingtièmes, mais on y excepte les offices et droits, et l'industrie. Il est supprimé en 1786.

2   Les impôts indirects

2.1   La gabelle

Bien qu'il y ait localement des gabelles sur d'autres produits (comme le vin), la gabelle sert essentiellement à qualifier l'impôt sur le sel organisé au XIVe siècle. Après les guerres de religion, une compagnie unique obtient la ferme des greniers à sel de 11 généralités. Par la suite, le bail des gabelles est incorporé dans la ferme générale. Le Trésor royal prélève donc un droit fiscal et contrôle strictement, amis sans les prendre en charge, l'exploitation et la vente du sel. La répartition de la production et de la demande est à l'origine d'une division du royaume en secteurs de statut différent que la grande ordonnance de mai 1680 codifie :

Les pays de grande gabelle (Anjou, Touraine, Normandie, Île de France, Picardie, Champagne, Bourgogne, Nivernais, Berry, Orléanais). Le sel, venu essentiellement des marais salants de l'Atlantique, est entreposé dans des greniers à sel. Les personnes habitant dans le ressort du grenier viennent y acheter très cher le sel, mis à vente après une longue période de séchage. Il est aussi possible d'acheter à des revendeurs, appelés regrattiers, approvisionnés par les marchands sauniers.

La consommation d'une certaine quantité de sel (le sel du devoir) est obligatoire, mais le sel destiné aux salaisons n'est pas compris dans cette répartition est doit être acheté en surplus. Quelques localités, toutefois, sont privilégiées, soit sous forme de liberté de consommation, soit en bénéficiant d'un prix moins élevé. De plus, le privilège du franc salé permet à quelques officiers, nobles et clercs, de se procurer du sel à prix marchand, exonéré du droit de gabelle.

Les pays de petite gabelle, ravitaillés par les marais salants de la Méditerranée, concernent approximativement le quart sud-est du royaume (du Languedoc au Massif Central et au Beaujolais, du Rouergue au Dauphiné). Le prix du sel y est bas, en raison d'une demande en général inférieure à la production. La consommation y est libre.

Les pays rédimés (Aunis, Saintonge, Guyenne, Landes, Armagnac, Angoumois, Limousin, Périgord, Agenais, Marche, Combrailles, Basse-Auvergne), appelés ainsi parce qu'en 1553 ils se sont rachetés du quart (quart de la valeur du sel) ou du quint, en payant une légère redevance. Le sel y est très bon marché : il en résulte une importante consommation par habitant.

Les pays de saline, alimentés par le sel gemme de Franche-Comté et de Lorraine (Bourgogne, Lorraine, Alsace, Franche-Comté). Le prix du sel y est un peu plus élevé que dans les pays rédimés, mais inférieur à celui des pays de petite gabelle.

Les pays de quart-bouillon, qui se limitent à la Basse-Normandie. On recueille sur les côtes le sable mélangé de sel. Après traitement par ébullition, il faut en verser un quart au Trésor royal.

Les pays exempts : provinces du Nord (Flandre, Artois, Hainaut, Boulonnais), quelques unes du Sud-Ouest (Béarn, Navarre), et surtout la Bretagne. Le commerce et les prix sont totalement libres.

Rang

Statut

Provenance du sel

1

Pays de grande gabelle

Marais salants de l'Atlantique

2

Pays de petite gabelle

Marais salants de Méditerranée

3

Pays de salines

Sel gemme de Franche-Comté et de Lorraine

4

Pays rédimés

Marais salants de l'Atlantique

5

Pays exempts

 

Figure 3 : Prix du sel : du plus coûteux au meilleur marché

Quelques lieux ont des statuts privilégiés, comme Paris, Versailles, et l'élection de Rethel. La Corse n'est pas soumise à la gabelle. Les agents de la gabelle (gabeleurs) font des visites à domicile : il faut pouvoir fournir à leur demande des billets de gabellement qui apportent la preuve de la quantité de sel achetée régulièrement au grenier à sel.

Il en résulte des différences de prix considérables, d'1/2 sou la livre en Bretagne sous Louis XIV à 13 sous dans certains pays de grande gabelle. La délit de faux-saunage est également fréquent : transport et vente, dans la clandestinité, du sel non gabelé, particulièrement aux limites de pays aux statuts différents. Les faux sauniers risquent des peines très dures, allant jusqu'à la mort.

2.2   Les aides

Les aides sont des impôts sur la consommation et la circulation des denrées. Leur ventilation, leur taux et leur répartition sociale et géographique sont d'une extraordinaire complexité. Les boissons sont les plus imposées.

2.3   Les traites

Ce sont des droits prélevés à l'entrée et à la sortie non seulement du royaume, mais de certaines provinces. Le régimes des traites comprend :

Les cinq grosses fermes, vaste ensemble allant de la Normandie à la Champagne et à la Bourgogne, du Poitou à la Picardie. Colbert procède en 1664 à une simplification et une unification des droits.

Les provinces réputées étrangères, sous-entendu au tarif de 1664 : Bretagne, Guyenne, Saintonge, Languedoc, Provence, Dauphiné, Lyonnais, Flandre, Artois. Elles paient des droits élevés non seulements avec les provinces d'autre statut, mais aussi entre elles.

Les provinces à l'instar de l'étranger effectif, réunissant les pays tardivement annexés : Alsace, Franche-Comté, Lorraine. Ces provinces commercent librement avec les États étrangers, mais se heurtent à un réseau dense de douanes, du côté des autres provinces françaises. Il en est de même pour les ports francs (Dunkerque, Bayonne, Marseille).

Le commerce est considérablement entravé par la multiplicité des droits douaniers et la complexité du système.

3   Les impôts ecclésiastiques : la dîme

3.1   Les formes de la dîme


C'est la dîme, redevance religieuse prélevée à l'origine sur tous les bénéfices, y compris commerciaux et artisanaux, mais portant pratiquement uniquement sur les fruits de la terre et sur les troupeaux. Elle est prélevée sur toutes les terres, quels que soient le rang et la religion de leurs possesseurs. En règle générale, les bois, les prés et les produits des étangs ne sont pas sujets à la dîme. Celui qui perçoit les dîmes d'une paroisse s'appelle le décimateur. La dîme n'est pas portable mais quérable. On distingue :

Les grosses dîmes, qui portent sur les revenus les plus importants : froment, seigle, orge, avoine et vin;

Les menues dîmes, portant sur les légumes et les fruits des arbres (appelées aussi "vertes dîmes");

Les dîmes de charnage portant sur le croît des troupeaux.

Les dîmes novales, portant sur les nouveaux fruits. Il y a dîme novale pour les terres récemment défrichées et portant récolte, ou quand sur une même terre on passe de fruits non décimables à des fruits décimables. Lorsque les cultures cessent, la dîme cesse.

3.2   Dîmes solite et insolite

La dîme solite est en usage depuis longtemps; la dîme est insolite lorsque le décimateur la demande sur un revenu autrefois non concerné. Si une dîme insolite est perçue pendant 40 ans sans difficulté, est elle dîme d'usage. La quotité de la dîme est affaire de coutume et elle peut varier, en un même lieu, d'un pays à l'autre. Il est assez rare que le taux de la dîme dépasse le dizième; il est fréquemment situé entre 1/11 et 1/13.

La dîme inféodée est tenue en fief par un laïc à qui elle a été cédée ou qui l'a usurpée. Beaucoup de seigneurs de paroisses en possèdent encore à la fin de l'Ancien Régime, malgré la difficulté de produire un titre.

À la fin de l'Ancien Régime, les tribunaux tendent à diminuer le nombre de dîmes solites et à accroître celui des dîmes insolites. En 1784, le Parlement de Normandie déclare que les dîmes solites, les seules exigibles en droit, sont limitées aux quatre gros fruits : froment, seigle, orge, avoine; le décimateur ne peut réclamer les autres que s'il peut donner la preuve rigoureuse d'usage pendant 40 ans. Pour les nouvelles espèces plantées, les parlements, comme celui de Toulouse, les déclarent exemptes de dîmes puisque le décimateur n'a pas de titre de possession.

Source : Emilia Robin Allez visiter son site le coin des historiens

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